Séminaire « Ce que nous font les films »

big_sleep2.pngLe projet « Ce que nous font les films » interroge la dimension performative du cinéma, c’est- à-dire les effets qu’ont les films sur la pratique des chercheurs, des cinéastes, des spectateurs. Ces effets témoignent de l’importance du cinéma dans nos vies : les films nous habitent ; ils influencent nos discussions et nos actions, et inscrivent notre expérience esthétique dans un tissu de relations qui dépasse largement le moment de la projection.

Le colloque qui s’est tenu les 23-24 mai 2018 à La Fémis et à l’ENS Louis-Lumière nous a permis de questionner les expériences cinématographiques d’un point de vue théorique et pratique.

Ces dernières s’affirment tantôt comme des instruments d’interrogation et d’exploration de la réalité. Le cinéma nous présente des figures audiovisuelles prises dans un dispositif « diplomatique » capable de créer un espace d’écoute et d’enregistrement de la parole, et de révéler nos états d’être, nos états d’âme (les films de Rémi Lange) ou encore d’offrir une pédagogie de la perception (Nuytten/film de Caroline Champetier). Tantôt il ouvre un espace de dialogue qui favorise une meilleure compréhension de nos relations interpersonnelles (Marc Vernet) et implique, à travers la diversité des pratiques spectatorielles, la formation de communautés d’interprètes (Guillaume Soulez). Dans cette dynamique délibérative, le (re)montage devient une opération essentielle pour tout spectateur. Ce dernier s’approprie l’œuvre et se révèle critique de cinéma dans son sens le plus noble : ses souvenirs modifient le film et ses descriptions permettent d’en transmettre une expérience personnelle (Chloé́ Galibert-Laîné). En plus de cette dimension discursive, les films peuvent produire des effets somatiques : les corps à l’écran et le corps du spectateur dans la salle entrent alors en résonance (Jean-Marc Leveratto). Ce « corps-à-corps » convoque notre mémoire sensorielle en faisant cohabiter plusieurs temporalités, plusieurs postures (Jenny Teng). Enfin, le cinéma s’affirme tantôt comme un outil d’éducation, nous apprenant à agir, à nous parfaire, à donner une consistance à nos expériences relationnelles. Cette capacité́ transformatrice de l’individu, ce perfectionnisme souligne la dimension éthique du cinéma ; il éduque, il élève (Sandra Laugier).

En faisant le pari de la description précise et attentive de moments qui nous ont marqués dans quatre films – Eternal Sunshine of the Spotless Mind de Michel Gondry (2004), The Tree of Life de Terrence Malick (2011), The Misfits de John Huston (1961) et Harry Potter et le Prisonnier d’Azkaban d’Alfonso Cuaron (2004) – ce séminaire se propose de poursuivre les réflexions développées lors de notre colloque à travers un atelier d’analyse filmique. Ce sera l’occasion de revisiter ces effets (critique, dialogique, somatique, éducatif) mais aussi de considérer un postulat, celui de Jessie Martin.

« Un discours, précise-t-elle, ne peut se faire en surplomb d’un film [,] il doit s’élaborer à partir de lui, c’est-à-dire en n’oubliant jamais que le film est le fondement même de notre discours. »

Jessie Martin, Décrire le film de cinéma. Au départ de l’analyse, coll. « Les Fondamentaux », Presses de la Sorbonne Nouvelle, Paris, 2011, p. 7-8.

Nous continuerons ainsi d’interroger la façon dont un film peut modifier notre regard et notre écoute, susciter des discussions sur nos postures morales, influencer nos manières de faire et de penser.

  • L’affiche du séminaire est disponible en téléchargement ici.